Homélie du père Raphaël Deillon, Père Blanc

du 27 décembre 2019

“ On a enlevé le Seigneur de son tombeau, et nous ne savons pas où on l'a mis. Jean vit et il crut. ”

L’enfant-Dieu de Noël à peine est-il passé avec sa joie, son innocence que nous avons déjà fêté hier St Etienne, 1er diacre martyr de l’Eglise, lapidé par des extrémistes au nom de Dieu. Les choses n’ont pas tellement changé…

Aujourd’hui en cette messe en l’honneur de notre toute nouvelle sainte, Marguerite Bays, nous fêtons aussi l’apôtre St Jean qui nous lance un défi

 

“Il vit et il crut.”

La succession de ces fêtes tour à tour joyeuses et tristes reflètent l’image de nos vies quotidiennes émaillées de joies et de peines. 

Oui, il faut beaucoup de foi aujourd’hui pour chanter le Christ qui renaît à la vie. Comme Marie au matin de la résurrection, nous reconnaissons que le Christ n'est pas toujours là où nous le cherchons: “On a enlevé le Seigneur et nous ne savons pas où on l'a mis.”

C’est le drame de notre époque : on ne sait plus où on a mis Jésus...

Croyez-vous que c’était plus facile autrefois ? A la mort du Christ, les premiers chrétiens se sont posé la même question. Seigneur où es-tu ?

St Jean, voit le tombeau vide et dit : il est ressuscité. Mais il ne faut pas s’imaginer que les premiers chrétiens ont cru du premier coup, il a fallu des mois, que Jésus leur apparaisse et surtout la force de l'Esprit Saint, pour être convaincus de la présence du Christ ressuscité.

Et si vous êtes ici aujourd’hui, c’est aussi grâce à la foi de ceux qui nous ont précédés. Tous les saints qui ont cru au Christ et donné leur vie pour Lui. 

Nous pensons bien sûr à Ste Marguerite Bays, cette femme si simple de tous les jours qui nous montre le chemin. Je pense aussi, à 4 de mes confrères Pères Blancs assassinés un 27 décembre en Algérie et maintenant béatifiés.

Ce n’était pas des surhommes, je les ai bien connus, mais ils ont donné leur vie en restant avec le peuple qu’ils aimaient tout en sachant qu’ils étaient menacés. J’aurai pu être bienheureux, car je suis resté moi aussi avec mon peuple, mais les terroristes m’ont manqué, dommage, j’aurais fait un beau bienheureux… sans pour autant être un surhomme !

Tous ces saints et ces bienheureux ont donné leur vie pour dire que la mort n’a pas son dernier mot et que nous ressusciterons comme le Christ.

A nous maintenant d’annoncer par nos vies que nous sommes chrétiens. Les récentes veillées des fenêtres de l’Avent nous ont fait nous rencontrer. Nous nous découvrons catholiques, protestants, musulmans, bouddhistes, incroyants, indifférents, mais tous mobilisés pour une seule fête celle du Christ qui vient pour tous les humains. 

Bonne occasion en ce temps de Noël de manifester clairement notre foi de chrétiens devant un monde qui doute.

« Nous ne sommes plus dans un monde de chrétienté, nous dit le pape François, la foi en Europe disparait…. Ne vous laissez pas voler votre foi … », ajoute-t-il.

En effet pour beaucoup, le tombeau est vide, c’est tout. Une vie profane fait son trou et sape l’envie des croyants de manifester leur foi. On n’ose même plus parler de Dieu.

Et pendant ce temps-là à côté de nous d’autres croyants s’affirment, prient ostensiblement, arborent leurs identités de croyants. Une amie chrétienne me disait dernièrement : « la seule personne avec qui j’ose parler de Dieu est une musulmane »…

Bien sûr beaucoup expriment leur foi par des engagements dans des associations, elles sont myriades aujourd’hui, c’est une autre façon de dire notre foi. Mais le monde a besoin qu’on leur parle de Jésus-Christ, sauveur du monde. 

Les anciens transmettaient leur foi en famille ou dans leur paroisse.

Marguerite Bays s’était faite catéchiste auprès des enfants avec des dessins dignes de nos bandes dessinées pour parler de la vie de Jésus.

Que savent encore nos enfants de notre foi chrétienne inscrite sur vos vitraux.

J’ai fait le tour de l’église de Siviriez… Au fond à gauche, c’est St François Xavier, qui meurt martyr en Chine, puis en remontant la nef, c’est la petite Thérèse de Lisieux, patronne des missions depuis son couvent et morte à 20 ans promettant de faire pleuvoir des grâces du ciel, puis St François d’Assise, amoureux de la création, un saint qu’il faut prier pour notre planète très malade. Puis St Pierre Canisius guéri à Notre Dame de Bourguillon que vous chérissez tous. Puis la Sainte Vierge qui a sa place de choix en ce temps de Noël.

St Nicolas de Flue, patron de la Suisse qui nous demande d’ouvrir notre patrie à toute misère, puis St Pierre aux clés, « ce que tu auras lié sur la terre sera lié dans le ciel… », qui nous invite à la réconciliation. Puis, l’annonciation, la naissance de Jésus. Jésus tenté au désert et Jésus à table avec ses disciples. Et enfin St Jean devant le tombeau vide : « il vit et il crut ».

Voilà Ste Marguerite Bays bien entourée. Elle nous dit aujourd’hui de ne pas avoir peur d’affirmer sa foi de chrétiens. Une longue tradition est derrière nous. Le pape François nous appelle de toute sa force à croire à l’Evangile et surtout à le pratiquer.

J’ai beaucoup fréquenté les musulmans dans ma vie. Il y a deux choses auxquelles ils reconnaissent un chrétien : la première c’est l’honnêteté : « que ton oui, soit oui, que ton non, soit non ! » C’est à ça qu’on nous reconnaîtra.

La deuxième, c’est l’amour des autres : « on saura que vous êtes chrétiens si vous vous aimez les uns les autres. » Et ça, pour les gens, ça ne trompe pas. Un imam m’a dit : vous, vous parlez de l’amour de Dieu dans vos homélies, je vais en parler davantage.

Ste Marguerite Bays, tous les saints et les bienheureux, priez pour nous, que nous témoignons de notre foi au Christ dans notre vie de tous les jours. Amen